Mutualiser les dettes pour mieux faire face aux répercussions économiques dans un contexte de pandémie, voilà la solution que plusieurs Etats Européens y compris l’Italie et la France, proposent. Baptisée « Coronabonds », cette mutualisation essuie un rejet total de la part des pays du Nord et de l’Allemagne, mieux lotis budgétairement. De nombreuses questions se posent sur l’efficacité de cette solution dans la crise sanitaire.
C’est chacun dans son coin que les pays de la zone euro font face à la pandémie du Covid-19. Si jusque-là, tous s’en sortent par leurs propres moyens, ils sont nombreux à prévoir d’emprunter à nouveau pour soutenir leurs économies, surtout ceux qui croulent déjà sous la dette comme l’Italie et l’Espagne.
Dans ces deux pays, le poids de la dette est nettement supérieur au produit intérieur brut annuel. Pourtant, la crise économique n’en est qu’à ses débuts. D’un moment à l’autre, il deviendra très difficile pour ces pays très fortement endettés de faire de nouveaux emprunts sur les marchés et s’ils y parviennent, cela leur coûtera plus cher.
Face à cette situation, la solution d’obligations mutualisées dont l’émission serait faite au nom de l’ensemble de l’Union européenne pourrait représenter une solution pour apporter un nouveau souffle économique aux États les plus vulnérables. Avec la participation d’États comme l’Allemagne, le coût de cet emprunt serait quasi nul, puisqu’il fait partie de ceux qui empruntent aujourd’hui à un taux négatif.
Faciliter l’accès au financement égalitaire et sans frais à tous les États membres de l’UE, c’est l’objectif que visent les 14 pays à l’initiative de cette solution. Elle est présentée comme un outil solidaire.
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En 2012, lorsque l’idée des « eurobonds » émerge pour la première fois en pleine crise de la dette, la chancelière allemande, Angela Merkel, y avait été farouchement opposée. « Jamais de mon vivant », avait-elle alors vivement martelé. Avec les Pays-Bas, l’Autriche et la Finlande, l’Allemagne a été contre toute idée de solidarité financière. À l’époque, les raisons étaient économiques, mais aussi politiques, car le projet était « électoralement insoutenable ».
Pour l’économiste britannique Erik Jones, ce nouveau projet dans le contexte de la crise en 2020 n’a rien à voir avec celui de 2010. Il n’est pas question de la conversion d’une ancienne dette, contractée à des taux faramineux par des États les plus faibles de la zone euro. Cette fois-ci, il s’agit d’émettre une nouvelle dette sur une courte durée, tel que Bruno Le Maire, ministre français de l’Économie, l’a suggéré.
Des solutions alternatives en cas d’échec des « Coronabonds », il y en aurait plusieurs. Pour le prix Nobel d’économie Jean Tirole, la BCE pourrait lancer une action massive de rachat de la dette publique, assortie de baisse des coûts et un report indéfini des échéances de remboursement. Si l’Allemagne l’accepte, cette piste sans conséquences politiques pourra être explorée.
L’autre solution serait de recourir au Mécanisme européen de stabilité mis en place au cours de la crise de dette. Il avait été rejeté par les États du sud à cause de la mise sous tutelle de Bruxelles de leurs finances. Si cette condition n’est pas abandonnée, l’Espagne et l’Italie pourraient la rejeter.