Le Conseil fédéral, l’organe exécutif de la Confédération suisse, a annoncé hier, dimanche 10 juin, le rejet à 75,7 % de l’initiative « Monnaie pleine » ayant pour but de retirer le droit de création monétaire aux banques suisses. La proposition de réforme qui espérait obtenir une majorité simple des électeurs n’a également été acceptée par aucun des 26 cantons de la confédération.
Cette initiative, qui a pour intitulé officiel « Pour une monnaie à l’abri des crises : émission monétaire uniquement par la Banque nationale ! », visait à attribuer le monopole de la création monétaire à la Banque nationale suisse (BNS), afin de rendre le système financier beaucoup plus résistant et de faire du franc suisse la plus sûre des monnaies du monde. Elle avait également pour objectif de soulager les contribuables dont les impôts sont utilisés par l’État pour venir au secours des banques. Le projet n’a pourtant pas réussi à convaincre les Suisses qui ont craint les conséquences de l’introduction d’un tel système de monnaie sur l’économie : secteur bancaire affaiblit, coûts supplémentaires pour la clientèle, remise en cause de l’indépendance de la banque nationale, etc.
Il a été rejeté à plus de trois-quarts des suffrages exprimés. Ueri Maurer, ministre des Finances suisse, a déclaré à cet effet que le peuple était contre la prise de risque et que ces propositions ne présentaient pour les Helvétiques aucun avantage. Il a souligné que le système bancaire se portait très bien et que le Conseil confédéral restera engagé pour sa stabilité. Si la proposition de réforme avait obtenu approbation, la Suisse aurait été le premier pays à interdire aux banques privées de créer de la monnaie, ce qui aurait été, pour les opposants, une expérimentation des plus dangereuses.
Même si la proposition n’a pas obtenu grâce aux yeux de la majorité des électeurs, ses instigateurs ont affirmé rester engagés dans la lutte. Le porte-parole de la campagne, Raffael Wüthrich, a d’ailleurs déclaré que « le débat ne fait que commencer » et que le combat se poursuivra pour que « la monnaie soit au service du peuple et pas le contraire ». Selon son coordinateur romand, Jean-Marc Heim, une réforme du système bancaire est également indispensable pour l’intégration de la numérisation et pour la réglementation des crypto-monnaies. Les opposants au plan, parmi lesquels le Conseil fédéral, la BNS et les organisations patronales, se réjouissent pour leur part de l’échec de cette campagne. Selon Olivier Feller, conseiller national et coprésident du comité contre l’initiative, les citoyens recherchent beaucoup plus de stabilité et estiment que des sujets tels que la fiscalité, les relations avec l’Union européenne ou encore les assurances sociales sont plus importants.
La campagne a connu son plus grand succès dans le canton de Genève avec 40 % des votants en sa faveur. Jean-Marc Heim y voit une réussite au plan national car d’après lui, le texte a suscité le réveil d’une conscience parmi la population.
11 juin 2018 La Rédaction