Le mois dernier, le projet européen de taxe relatif à la taxe Tobin a connu un rebondissement dans son processus de mise en place. Il a en effet été freiné par le désaccord des différents ministres menant les travaux pour sa mise en place. Zoom sur cette taxe et les motifs et le contexte de son ralentissement.
La taxe Tobin prélevée sur les transactions financières aurait dû entrer en vigueur d’ici le début de l’année prochaine. Mais cela n’est plus si sûr eu égard aux différends survenus entre les nombreux ministres des Finances européens à son égard.
La taxe Tobin est une taxe qui serait prélevée sur les transactions financières. Les origines d’une telle taxe remontent jusqu’en 1936, où elle avait été évoquée par John Maynard Keynes dans sa Théorie générale de l’emploi de l’intérêt et de la monnaie. L’idée a été reprise en 1972 par l’économiste James Tobin juste après l’abandon de l’or comme étalon et l’instauration des changes flottants dans le but de limiter les effets néfastes de spéculations à court terme, et donc de freiner la volatilité des taux de change. Sa proposition portait sur une taxe prélevée sur tous les achats d’instruments financiers dans une autre devise. Une telle taxe serait internationale et uniformément convenue, chaque pays étant responsable de l’administration des taxes prélevées sur sa compétence. Le taux appliqué pour la taxe Tobin varierait entre 0.05% et 0.02% du montant de la transaction effectuée. Dans les années 1990, le Professeur Paul Bernd Spahn compléta la proposition de Tobin en suggérant une taxe à double niveau. Le premier niveau à faible taux serait appliqué aux transactions financières demeurant dans une limite convenue. Mais au-delà de cette dernière, ces transactions se verraient appliquer un taux plus élevé. Une telle proposition avait pour but de freiner l’effet de spéculation entrainé par des échanges répétés. La taxe Tobin connut une troisième variation lorsque l’association pour la taxation des transactions financières et pour l’action citoyenne créée en France proposant de l’étendre à toutes les transactions financières qu’elles soient faites en monnaie locale ou en devises.
La taxe Tobin a été mise en étude par l’Union Européenne pour mise en œuvre après la crise financière de 2008. L’Union craignait en effet la survenance d’une nouvelle crise financière. Le projet proposé et porté par la France et l’Allemagne était de créer une taxe sur les transactions financières s’inspirant de la taxe Tobin. De nombreux pays européens, tels que la Grande Bretagne, étaient alors montés au créneau pour protester contre cette proposition de loi. Après des années de discussions, il n’est resté que 11 pays de l’Union sur les 28 qui acceptaient l’adoption de la taxe Tobin. Ils se sont réunis en décembre dernier pour finaliser le projet de taxe, mais les choses ne se sont pas exactement passées comme elles auraient dû.
A leur dernière rencontre, les 11 pays de l’UE devant organiser la taxe Tobin sont tombés sur leur désaccord. La France notamment a émis des réticences relatives au projet tel qu’initialement prévu. Son ministre des Finances Michel Sapin s’est en effet prononcé en novembre 2014 en la faveur d’une taxe limitée seulement aux actions et à certains produits tels que les CDS et les contrats d’assurance contre le défaut de paiement. Or ces produits ne représentent que 3% de l’ensemble des produits dérivés, ce qui prive la future loi de 97% de sa matière imposable. La justification fournie par le ministre pour cette proposition est qu’une loi portant sur l’ensemble des transactions aurait été acceptable par la France uniquement si tous les pays européens y étaient soumis. Naturellement les autres ministres des Finances d’adhérèrent pas à la nouvelle proposition de la France et ont convenu de se rencontrer au début de la nouvelle année pour en rediscuter. Les ONG rejettent le ralentissement de l’adoption de la taxe par la France qui, selon eux, essaie de protéger ses banques contre la concurrence de celles du Royaume-Uni qui n’a pas accepté de se soumettre à la taxe.
14 janvier 2015 La Rédaction